Surtout que les précédents programmes de lutte notamment les Plans stratégiques intégrés d'urgence (PSIU) ont montré leurs limites. Toutefois, le projet de loi 52-05 portant code de la route, élaboré par le ministère des Transports et actuellement au Parlement, suscite une grande réticence de la part des professionnels qui le taxent d'être « trop corsé ». Et il y a de quoi. Des années de laisser-aller et de laxisme dans la lutte contre le vandalisme routier ne s'effacent pas d'un revers de la main.
Un changement aussi radical du comportement et des m½urs de conduite ne demande-t-il pas un traitement progressif ? Débrayages, pressions (parfois musclées) et menaces : tous les moyens sont jugés bons par les récalcitrants afin de faire entendre leur voix et faire plier le département de tutelle. La résistance est tellement acharnée qu'elle a parfois dépassé les limites de l'acceptable, en prenant en otage l'économie nationale, ou en s'attaquant directement à la personne du ministre de l'Equipement et des Transports. Refus légitime ou systématique ? Les réponses sont aussi multiples que différentes. « Le Maroc n'est pas encore prêt pour une loi aussi drastique », « il vaut mieux s'intéresser à l'état des routes avant de nous concocter une loi à la française », « la nouvelle loi ne fera pas baisser les accidents mais remplir les poches des agents verbalisateurs », « tous les conducteurs partiront en prison quelques mois après l'entrée en vigueur de cette loi », avancent les récalcitrants.
D'autres, moins emportés, tempèrent. Pour eux, la guerre des routes a assez causé de dégâts et il est grand temps d'y mettre un terme. Seulement, la loi doit être pensée en prenant en compte les spécificités des conducteurs marocains notamment leur niveau de vie très bas, l'état lamentable des routes, un système de contrôle se prêtant à la corruption et le comportement, loin d'être citoyen et pour le moins bizarroïde, des piétons. Le recours à des mesures aussi radicales n'est pas du goût de tout le monde. « Comment veulent-ils mettre un conducteur en prison après un accident alors que nombre de piétons traversent encore la route n'importe comment et n'importe où ?
Comment voulez-vous qu'un conducteur paye des amendes qui dépassent largement son salaire mensuel, alors qu'il ne bénéficie ni d'assurance maladie, ni de retraite et, parfois, ni d'heures de repos ? », soulignent des professionnels. Si plusieurs conducteurs, professionnels ou autres, affichent leur refus catégorique du projet de loi du code de la route, la plupart d'entre eux ignorent les détails de ce projet. Leur connaissance de la loi se résume à quelques points saillants sur lesquels ils déversent un chapelet de critiques notamment « la prison en cas d'accident causant des blessés », « les amendes excessives » et « le futur permis à points ». Le reste du projet reste complètement ignoré. Pourtant, il est très intéressant, voire à saluer, surtout en matière de contrôle technique des véhicules, grande calamité dans notre pays. En effet, le nombre des véhicules défaillants qui circulent sur nos routes est édifiant à plus d'un titre.
La grande partie des accidents est due essentiellement à l'état catastrophique du parc. Autre point positif, et pas le dernier, l'enseignement de la conduite. En effet, notre système d'apprentissage, surtout pratique, frôle le ridicule : marche arrière, stationnement, entrée du garage et le futur conducteur est lâché dans la nature. Fini cette légèreté pour le moins insoutenable.
Emprisonnement et grosses amendes
Les différentes catégories des infractions fixées par le projet de loi du code de la route sont les délits, les contraventions de la première, deuxième et troisième classes. Une lecture des sanctions montre bel et bien que le département des Transports n'a pas été tendre. Grosses amendes et emprisonnement sont légion pour mettre fin au vandalisme sur les routes.
Si dans la plupart des cas, le durcissement est acceptable notamment en cas de conduite en état d'ivresse, fraude à l'examen de conduire, falsification de permis, remise en circulation d'un véhicule gravement accidenté sans expertise..., la sévérité des amendes et l'emprisonnement en cas d'accident entraînant des blessures restent « excessifs », selon plusieurs personnes interrogées. En effet, selon l'article 165 (pour ne citer que celui-ci) du projet de code de la route, « tout conducteur qui, par maladresse, imprudence, inattention, négligence ou manquement à une obligation de sécurité ou de prudence prévue par la présente loi ou par les textes pris pour son application (autant dire en toutes circonstances), cause involontairement à autrui des blessures, des coups ou une maladie consécutifs à un accident de la circulation, entraînant une incapacité temporaire de travail de plus de six jours est puni d'un emprisonnement de 1 mois à 2 ans et d'une amende de 2.000 à 10.000 DH ou l'une de ces deux peines seulement ».
Cette sanction peut atteindre de trois mois à trois ans d'emprisonnement et une amende de 4.000 à 20.000 DH avec les circonstances aggravantes. Si ces dernières notamment l'état d'ivresse, le non-respect du code de la route ou la défaillance du véhicule sont compréhensibles, la peine en soi donne beaucoup à réfléchir.
Qui et comment peut-on définir avec exactitude les causes réelles d'un tel ou tel accident ?
La marge de l'erreur n'est-elle pas grande ? Nos agents seront-ils qualifiés pour le faire et nos méthodes seront-elles adéquates ?
Autant de questions qui préoccupent les usagers de la route et sur lesquelles le ministère doit se pencher pour sortir de l'impasse et faire avancer les choses. Le Maroc le vaut bien.
Permis à points
Ce système suscite beaucoup d'inquiétudes de la part des conducteurs, surtout les professionnels. Selon l'article 27 du code de la route, à l'issue d'une période probatoire fixée à deux ans pendant laquelle le permis est affecté de 12 points, le permis de conduire est affecté d'un capital maximal de 24 points, réduit, le cas échéant, du nombre de points perdus par l'intéressé durant la période probatoire. Le permis est annulé à compter de la date de la perte du dernier point.
Le nombre de points à retirer est fixé selon la gravité de l'infraction commise. Le titulaire qui perd la totalité des points ne peut se présenter de nouveau à l'examen qu'après six mois, et après avoir subi, à ses frais, une formation spécifique de sensibilisation à la sécurité routière.
Le délai précité est porté à deux ans lorsqu'un nouveau retrait de la totalité des points intervient dans un délai de cinq ans suivant le précédent retrait. Pour nombre de conducteurs, le permis à points n'est pas un problème en soi. Mais c'est l'intégrité des agents verbalisateurs qui pose un problème. « Avec le retrait des points, certains agents véreux auront un moyen de pression en plus sur les conducteurs », soulignent-ils.
Retrait des points du permis de conduire
INFRACTIONS
N°.....Infractions d'ordre..........Points à retirer
01 Homicide involontaire avec circonstances.............16 aggravantes, suite à un accident de circulation (si l'annulation du permis de conduire n'est pas prononcée)
02 Homicide involontaire avec circonstances.........12 aggravantes, suite à un accident de circulation
03 Blessures involontaires, entraînant une infirmité..............12 permanente, avec circonstances aggravantes, suite à un accident de circulation (si l'annulation du permis de conduire n'est pas prononcée).
04 Blessures involontaires, entraînant une infirmité.....10 permanente, sans circonstances aggravantes, suite à un accident de circulation
05 Blessures involontaires, consécutives à un accident.....8 de la circulation, sans circonstances aggravantes
06 Blessures involontaires, consécutives à un accident.....6 de la circulation, sans circonstances aggravantes
07 Conduite d'un véhicule sous l'empire d'un état alcoolique.....8 ou sous l'effet des substances stupéfiantes ou médicamenteuses contre-indiquées pour la conduite d'un véhicule
08 Le fait ne pas s'arrêter, après avoir causé ou occasionné .....8 un accident de la circulation et de tenter ainsi d'échapper à la responsabilité, en prenant la fuite ou en modifiant l'état des lieux ou par tout autre moyen.
09 Le fait de faire circuler un véhicule ou une remorque.....10 muni de fausses plaques d'immatriculation ou usage frauduleux du certificat d'immatriculation du véhicule.
10 Le fait de mettre en circulation un véhicule ou une remorque dépourvu de plaques d'immatriculation.....6
11 Conduite d'un véhicule, dont la conduite nécessite.....6 l'obtention d'un permis de conduire, malgré une suspension administrative ou judiciaire du permis de conduire
12 Conduite d'un véhicule, dont la conduite nécessite.....6 l'obtention d'un permis de conduire, pendant la durée de la rétention du permis de conduire.
13 Le fait de ne pas déposer un permis de conduire suspendu.....6
14 Conducteur, sommé de s'arrêter, a refusé de s'exécuter.....6 ou de soumettre aux vérifications prescrites ou ne respecte pas l'ordre d'immobilisation du véhicule ou refuse de conduire ou de faire conduire son véhicule en fourrière ou refuse d'obtempérer aux injonctions légales qui lui sont faites
15 La conduite à titre professionnel sans disposer de.....4 la carte du conducteur professionnel
16 Le dépassement de la vitesse de 50 km/h ou plus, .....8 au dessus de la vitesse maximale autorisée
17 Circulation en sens interdit.............................6
18 La marche arrière ou le demi-tour sur une autoroute........6 notamment ou une route expresse en traversant la bande centrale séparative des chaussées
19 L'emprunt de l'autoroute à contre courant de la circulation.....6
20 Le dépassement, de plus de 40%, du poids total en charge.....6 autorisé inscrit sur le certificat d'immatriculation
21 Le dépassement du poids total en charge autorisé au.....6 passage d'un ouvrage de franchissement
CONTRAVENTIONS
22 Le non-respect, par un conducteur d'un véhicule, de l'arrêt.......6 imposé par un panneau de STOP ou par un feu rouge de signalisation
23 Le dépassement de la vitesse de plus de 30 à moins...........6 de 50 km/h, au dessus de la vitesse autorisée.
24 Le non respect du droit de priorité........................6
25 Dépassement non réglementaire....................6
26 Circulation de véhicule sur la voie publique, de nuit.....6 sans éclairage, hors agglomération
27 Conduite d'un véhicule de transport en commun de.....6 personnes sans autorisation ou transport de personne en surnombre
28 Conduite d'un véhicule en absence du certificat du.....6 contrôle technique
29 Circulation sur une bande d'arrêt d'urgence d'une autoroute.....4
30 Arrêt ou stationnement de véhicule, de nuit ou dans.....6 un lieu avec visibilité insuffisante, sans éclairage ni signalisation, sur une chaussée dépourvue d'éclairage public
31 Le dépassement de la vitesse de plus de 20 à 30 km/h,.....4 au dessus de la vitesse autorisée
32 Le dépassement, de plus de 20% à 40%, du poids total...............2 en charge autorisé inscrit sur le certificat d' immatriculation
33 Conduite d'un motocycle, d'un tricycle ou quadricycle.........2 à moteur, non carrosé, sans port d'un casque homologué
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